FOCom témoigne de la crise sociale

Le procès en appel des ex-dirigeants de France Télécom a débuté le 11 mai 2022. En 2019, ils avaient été condamnés en 1ère instance pour avoir « mené une politique de déflation des effectifs à marche forcée » qui a poussé à bout les salariés voire à attenter à leur vie. Maître Riéra, l’avocat de FOCom, a dénoncé un mécanisme mortifère mis en place lors des différents plans de restructuration, dont Next et ACT, visant à diminuer le nombre de postes de travail sans jamais s’interroger sur le sort des salariés.

L’évocation de mauvais traitements

Au cours du 2nd procès, les témoins et victimes avaient rapporté « des collègues sortaient du bureau des managers en pleurant, des responsables surveillaient leur travail, émettaient des commentaires désobligeants et des lettres de recadrage, des courriers proposant des emplois sans lien avec le domaine d’activité, des employés qui se sont retrouvés sans activité ». Et aussi « des cadres à qui l’on demande de faire partir un maximum de collaborateurs le plus vite possible, des mutations forcées, des postes de travail déménagés jusqu’à 8 fois en trois ans (…) ».
Maître Riéra a dénoncé un système « d’autisme organisé » où tous les signaux qui venaient du personnel ou des Organisations Syndicales étaient ignorés. Il a demandé à la Cour d’entrer en voie de condamnation à l’encontre des prévenus, afin que ceux qui dirigent aujourd’hui Orange, ou la dirigeront demain, ne puissent plus faire comme si la souffrance des personnels était quantité négligeable, et pour que les victimes obtiennent réparation financièrement et moralement.
L’enjeu est d’apporter des réponses sociales et juridiques aux actes délictueux commis qui dépassent le simple cadre de France Télécom et qui interrogent sur la portée juridique et sociale des pratiques managériales et des responsabilités pénales qu’elles génèrent.

Un verdict inacceptable !

Le 30 septembre, la cour d’appel de Paris a communiqué le verdict en appel. Les peines allégées ont indigné les victimes ou familles de victimes ainsi que les parties civiles dont FOCom. Pour Didier Lombard, président directeur général de France Télécom de 2005 à 2010, la sanction est ramenée à un an de prison, intégralement couverte par le sursis et assortie d’une amende de 15 000 €. Idem pour Louis-Pierre Wenès. Tous deux demeurent coupables d’un « harcèlement institutionnel caractérisé » dans le cadre de plans de restructuration mis en place à partir de 2006 et qui visaient notamment au départ de 22 000 employés du Groupe et à la mobilité de 10 000 autres.
En dépit d’alertes multiples, les agissements harcelants induits par l’objectif de déflation des effectifs imposé par les dirigeants ont créé un climat d’insécurité permanent pour tout le personnel, avec des conséquences en cascade, aboutissant pour un certain nombre de salariés à des dépressions, des tentatives de suicide et des suicides, a confirmé la Cour, dans un communiqué.

Une 2ème crise sociale se profile à Orange

FOCom a insisté sur le fait que ce verdict de condamnation devait servir à briser l’omerta dans les entreprises et à libérer la parole des victimes pour construire une résistance au harcèlement. Orange et ses dirigeants ont un devoir de mémoire envers les victimes et leurs familles. Leur responsabilité pénale peut être engagée à nouveau en cas de manquement aux obligations de santé et sécurité. Et ce, d’autant plus alors que la situation sociale est désastreuse, en dépit de nos alertes réitérées auprès de la direction. La Commission des Risques Professionnels et de Promotion de la Santé au Travail a souligné « la récurrence des alertes, ce qui fait craindre une forme de résignation des salariés qui ne voient pas d’améliorations malgré leurs remontées ; une forme d’habituation et de banalisation du mal-être des équipes, là où les termes de « surmenage », « burn-out » se font très souvent entendre et ne constituent plus des cas isolés. Plus que jamais, FOCom est déterminée à défendre les salariés. Nous exigeons des engagements concrets et immédiats pour toutes les situations individuelles ou collectives de souffrance au travail.