En matière de santé au travail, l’actualité sociale a été très riche en août 2021. Plus discrète que la loi relative à la vaccination obligatoire et à l’extension du passe sanitaire, mais tout aussi importante, FO Com vous livre la teneur de cette loi dite « Santé » du 2 août 2021.

Voici les principales mesures, qui, sauf exceptions, sont entrées en vigueur le 31 mars 2022 et qui se classent en trois thèmes :

  • Prévention au travail
  • Suivi médical
  • Formation sécurité

Prévention au travail

Le document unique d’évaluation des risques (DUER) existant déjà aux seins de nos établissements, qui reste un outil indispensable à la prévention comme le précise régulièrement FO COM, ce document figure désormais dans le Code du travail sous un nouvel article (c. trav. art. L. 4121-3-1 nouveau, V, A).

La loi prévoit que l’employeur devra, à l’avenir, conserver le DUER, dans ses versions successives, pendant une durée d’au moins 40 ans. Jusqu’à aujourd’hui les intitulés, décisions… étaient modifiés à chaque fois que nous travaillions sur les risques. Par ailleurs, il est prévu que l’employeur devra tenir ce document à la disposition des travailleurs comme aujourd’hui, des anciens travailleurs, ainsi que de toute personne ou instance pouvant justifier d’un intérêt à y avoir accès.

Enfin, pour garantir cette conservation, la loi prévoit que le document sera déposé, de façon dématérialisée, sur un portail numérique géré par les organisations d’employeurs.

Création d’un passeport de prévention

Attention ! Ne devant pas être confondue avec le « passeport vaccinal » évidement, la loi Santé vient créer un « passeport de prévention ». Ce document vise à recenser l’ensemble des éléments certifiant les qualifications acquises par un salarié à l’occasion de formations relatives à la santé et à la sécurité au travail (loi 2021-1018, art. 6). Ce passeport de prévention entrera en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard, le 1er octobre 2022, il sera consultable à tout moment par les services de contrôle de l’État.

Négociation annuelle sur la qualité des conditions de travail

La loi prévoit que la qualité des conditions de travail (santé et la sécurité au travail, prévention des risques professionnels…) puisse être un des thèmes évoqués dans le cadre de la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. (Loi 2021-1018, art. 4 ; c. trav. art. L. 2242-19-1 nouveau). Afin de négocier ces actions, le législateur invite les partenaires à s’appuyer sur les acteurs régionaux et locaux de la prévention des risques professionnels (inspecteur du travail, CRAMIF, Préventeurs, SST, RPSST, SSCT).

Cette négociation annuelle s’intitulera désormais « Négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, la qualité de vie au travail et les conditions de travail » (loi 2021-1018, art. 4, 4°).

Harcèlement sexuel

La loi santé aligne la définition du harcèlement sexuel du Code du travail sur celle du Code pénal (art. 222-33 du Code pénal). Désormais constitue ainsi du harcèlement sexuel : (loi 2021-1018 art.1) des propos ou comportements à connotation sexuelle « ou sexiste » répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ; La Poste était déjà porteur sur le sujet.

Le harcèlement sexuel est également constitué :

  1. «Lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée »
  2. «Lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition »

« Toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. »

Suivi médical

Visite de reprise et de pré-reprise

La loi Santé vient intégrer dans la partie législative du Code du travail l’obligation des visites de reprise et de pré-reprise. (Loi 2021-1018, art. 27, 2° ; c. trav. art. L. 4624-2-3 et L. 4624-2-4 nouveaux).  Création de rendez-vous de liaison pour les arrêts longs.

La loi crée un « rendez-vous de liaison » entre le salarié et l’employeur, associant le service de prévention et de santé au travail, qui est le nouveau nom donné par la loi aux services de santé au travail, pour les arrêts de travail supérieurs à une durée qui sera fixée par décret, consécutifs à un accident ou une maladie, d’origine professionnelle ou non (loi 2021-1018, art. 27, 1° ; c. trav. art. L. 1226-1-3 nouveau).

Ce rendez-vous a pour objet d’informer le salarié qu’il peut bénéficier d’actions de prévention de la désinsertion professionnelle, de l’examen de pré-reprise et des mesures individuelles telles que l’aménagement, l’adaptation ou la transformation de son poste de travail ; mais également, des mesures d’aménagement du temps de travail justifiées par des considérations relatives notamment à son âge ou à son état de santé physique et mental.

Ce rendez-vous est organisé à l’initiative de l’employeur ou du salarié comme la visite de pré-reprise actuelle. Aucune conséquence ne peut être tirée du refus par le salarié de se rendre à ce rendez-vous.

Mise en place d’une visite médicale de mi-carrière

La loi instaure une visite médicale de mi-carrière, réalisée par le médecin du travail durant l’année civile des 45 ans, ou à une autre échéance définie par accord de branche (loi 2021-1018, art. 22 ; c. trav. art. L. 4624-2-2 nouveau).

Cette visite médicale a trois objectifs :

  • Établir un état des lieux de l’adéquation entre le poste de travail et l’état de santé du salarié, à date, en tenant compte des expositions aux facteurs de risques auxquels il a été soumis ;
  • Évaluer les risques de désinsertion professionnelle, en prenant en compte l’évolution des capacités du salarié en fonction de son parcours professionnel passé, de son âge et de son état de santé ;
  • Sensibiliser le salarié aux enjeux du vieillissement au travail et à la prévention des risques professionnels.
Modification de la visite médicale de fin de carrière

La loi Santé vient (encore) modifier le régime de la visite de fin de carrière des salariés sous surveillance renforcée. L’objectif de ces nouvelles dispositions est d’améliorer le suivi des salariés concernés, compte tenu des potentiels effets à long terme sur leur santé des risques auxquels ils ont été exposés.

La loi prévoit ainsi que la visite devra intervenir : (loi 2021-1018, art. 5, 2° ; c. trav. art. L. 4624-2-1 modifié). « Dans les meilleurs délais » après la fin de l’exposition au(x) risque(s) ayant justifié la surveillance renforcée si cette exposition cesse avant la fin de carrière.

Dans les autres cas, avant le départ en retraite.

Possibilité de recourir à la télémédecine pour la Médecine du travail

Les professionnels de santé au travail pourront recourir aux pratiques médicales ou de soins à distance, dite « télémédecine », pour le suivi individuel du salarié, compte tenu de son état physique et mental. Pour cela, la loi prévoit que le salarié devra donner son accord préalablement (loi 2021-1018, art. 21 ; c. trav. art. L. 4624-1 modifié).

Formation sécurité

La loi Santé comprend tout un volet lié à la formation sécurité concernant les élus du CSE et des référents « harcèlement sexuel » et « santé-sécurité ».

Formation santé, sécurité et conditions de travail (« SSCT »)

La loi Santé augmente le nombre de jours de formation :

  • Lors du premier mandat :
    • 5 jours minimum de formation SSCT, sans distinction selon l’effectif de l’entreprise.
  • En cas de renouvellement :
    • 3 jours pour chaque membre de la délégation du personnel ;
    • 5 jours pour les membres de la commission santé, sécurité et conditions de travail dans les entreprises de plus de 300 salariés ;

Tous les élus ont droit à cette formation, qui n’est pas uniquement réservée aux membres de la commission santé, sécurité et condition de travail. (Loi 2021-1018, art. 39, c. trav. art. L. 2315-18 modifié)

Financement de la formation SSCT par les OPCO

La loi prévoit une possibilité de financement de la formation SSCT par les *OPCO de la formation SSCT pour les élus du CSE et le référent du « harcèlement sexuel » dans les entreprises de moins de 50 salariés.

*OPCO : Un OPCO (Opérateur de Compétences) est un organisme agréé par l’Etat qui a pour but d’aider les entreprises ne dépassant pas 50 salariés à accompagner et à favoriser l’évolution professionnelle des salariés par le biais de la formation continue

La formation peut être prise en charge par les opérateurs de compétences au titre de leurs actions utiles au développement des compétences au bénéfice des entreprises de moins de 50 salariés. (Loi 2021-1018, art. 39 ; c. trav. art. L. 2315-22-1 nouveau).

Formation obligatoire du référent « santé et sécurité au travail »

Pour rappel, l’employeur doit désigner un ou plusieurs salariés compétents pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise

Jusqu’à présent, ce ou ces salariés pouvai(en)t demander une formation en matière de santé au travail. (c. trav. art. L. 4644-1). La Poste a été aussi précurseur sur le sujet en formant les préventeurs sur des cursus diplômants.

 Désormais, la formation du référent « santé et sécurité au travail » devient obligatoire. (Loi 2021-1018, art. 39 ; c. trav. art. L. 4644-1 modifié), ce qui risque de poser un problème concernant les formations SST que La Poste souhaite donner aux managers (accueil sécurité, poste de travail, manipulations des véhicules à deux ou trois roues….).

Pour FO COM, la Loi « santé » est une avancée peu significative dans la santé et la sécurité au travail.

Même si certains points sont tout de même positifs, nous serons comme toujours très soucieux que l’ensemble des engagements pris dans le cadre de cette loi soit soigneusement respecté. La santé et sécurité au travail ne se négocient pas !

Et aujourd’hui, bien que toutes les entreprises intègrent la SST et les conditions de travail dans leurs feuilles de route comme un vrai gage de qualité envers leurs clients, le chemin reste encore long pour faire de l’entreprise un environnement sûr et sécurisé pour les travailleurs.